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Blog d'étude critique et académique du fait maçonnique, complémentaire de la revue du même nom. Envisage la Franc-Maçonnerie comme un univers culturel dont l’étude nécessite d’employer les outils des sciences humaines, de procéder à une nette séparation du réel et du légendaire et de procéder à la prise en compte de ce légendaire comme un fait social et historique.

« Métaphysique et fiction des mondes hors-science » de Quentin Meillassoux

« Métaphysique et fiction des mondes hors-science » de Quentin Meillassoux

Georges Bormand

Dans une conférence prononcée en 2006 à l'École normale supérieure de la rue d'Ulm à Paris, à l'occasion du mois de la science-fiction (SF) et à laquelle je n'ai, hélas, pas assisté, sans quoi je me serais dépêché d'apporter un certain nombre de contradictions de logique mathématique, l'auteur de ce livre parue aux éditions des Forges de Vulcain, a prétendu, à partir du problème de Hume sur la contingence des lois du monde, définir un « genre » littéraire qu'il appellerait "fiction hors-science" et qu'il conviendrait d'opposer à la science-fiction, à laquelle on attribue les différents exemples proposés.

Je vais donc faire part de plusieurs remarques et contestations sur les thèses proposées.

Pour commencer, prenons le problème de Hume. L'idée de la non-contingence des lois scientifiques, comporte en filigrane dans son énoncé la même erreur que l'auteur met en évidence dans la réponse de Kant : comme Kant, Hume sous-entend que l'existence d'un cas de non-respect de la causalité remettrait en cause l'existence complète de toute causalité. Je pense que la non-vision d'une infinité de possibilités entre des lois toujours absolues et des lois toujours fausses est déjà présente dans l'énoncé de Hume et que son exemple de non-respect des lois contient en filigrane la réfutation de toute loi. Cela ne rend pas à mes yeux la « démonstration » kantienne de la contingence des lois plus valable pour autant, mais je crois que l'erreur de Kant est ailleurs que dans cette idée d'un monde sans aucune loi, elle est dans l'idée que, dans un tel monde, la conscience serait impossible. Nous verrons plus loin que je la crois néanmoins possible même dans un tel cas.

Ensuite, pour introduire les « cas intermédiaires », il envisage trois cas dont le dernier serait celui envisagé par Kant et, à mon avis, par Hume aussi :

-les mondes de type 1 où la causalité comporterait des exceptions assez rares pour que des lois soient trouvées et considérées comme générales, et les exceptions niées ; ce qui, en littérature, me paraît introduire tout le fantastique moderne ;

-les mondes de type 2 où les exceptions seraient fréquentes et entraîneraient une vigilance permanente et la recherche d'un comportement adapté à ce monde « magique » ; je crois qu'une expression littéraire de ce type de monde serait la littérature féérique (improprement nommée fantasy) ;

-les mondes de type 3, ceux de pur chaos et d’absence de lois ; si cela ne correspond pas à la littérature du « nonsense » et non, comme le voudraient Kant et l'auteur de cette conférence, à l'impossibilité de conscience...

En bref, contrairement à ce que prétend le conférencier cité, je crois que les types 1 et 2, imaginés par l'auteur, ne demandent absolument pas l'invention d'une branche spécifique de littérature qu'on appellerait fiction « hors-science » et dans laquelle on introduirait les fictions spéculatives de René Barjavel (Ravage, Denoël, 1943), de Douglas Adams (Le Guide du voyageur galactique, Denoël, 1982) ou (oubli grave de l'auteur) celles de Raphael Aloysius Lafferty.

Et que le mot maudit invoqué par cette conférence reste, une fois de plus, hors sujet pour parler de SF...

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F
Bonjour, j'aimerais savoir si vous aviez écrit l'argumentation sur la possibilité de conscience dans un monde chaotique parce que l'ensemble de votre article repose sur cette assertion et je ne trouve pas la justification sur votre site...
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A
Cette question du ternaire dans la gestion du monde imaginaire relève singulièrement le niveau<br /> Merci Georges
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