Blog d'étude critique et académique du fait maçonnique, complémentaire de la revue du même nom. Envisage la Franc-Maçonnerie comme un univers culturel dont l’étude nécessite d’employer les outils des sciences humaines, de procéder à une nette séparation du réel et du légendaire et de procéder à la prise en compte de ce légendaire comme un fait social et historique.
Patrick Simon
Acte créateur de la poésie comme à la recherche de la parole perdue chez les francs-maçons, au commencement était le verbe. Aussi, la poésie traverse les symboles, les analogies et autres rituels autour des mots. « Toute poésie répond à une inquiétude métaphysique, inquiétude qu’aucun système n’a jamais pu résoudre mais que la poésie, quelquefois parvient à apaiser » (Serge Brindeau, Affinités. La matière et l'esprit du poème, Les paragraphes littéraires de Paris, 1962).
Au début de la poésie en général, comme de la poésie maçonnique en particulier, tout commence par des chants. Il en est ainsi dans Le Livre des Constitutions d’Anderson, et à titre d’exemple le Cantique de clôture appelé aussi Chant des Apprentis :
« Frère et Compagnons
De la Maçonnerie,
Sans chagrin jouissons
Des plaisirs de la vie.
Munis d’un rouge bord
Que, par trois fois, un signal de nos verres
Soit une preuve que d’accord
Nous buvons à nos frères.
Le monde est curieux
De savoir nos ouvrages
Mais tous nos envieux
N’en seront pas plus sages.
Ils tâchent vainement
De pénétrer nos secrets mystères,
Ils ne sauront pas seulement
Comment boivent nos frères ».
Depuis les origines, la maçonnerie, sa symbolique, ses rituels, ses idéaux sont une source d'inspiration inépuisable pour les poètes. En voici un exemple récent issu du recueil cité, À l’orient des rêves :
« Tu taillais la pierre
sans savoir où tu allais
quand je t’ai revue
la lune était au plus haut
et savait où elle irait ».
PS
« Je taillais ma pierre sans savoir où aller.
Puis j’ai entendu des voix
Qui formaient un chant à l’unisson,
Des voix si claires en leur lumière,
Si transparentes en leur douceur
Des voix vibrantes en leur sourire ».
FF
« Là je marcherais
au-devant de la lumière
maître de ma vie
la lune face au soleil
pour donner force beauté »
PS
« La lune semblait si claire
Dans nos regards voilés
Frêles esquifs
Perdus dans des ténèbres
À rechercher le ciel ».
FF
Quelques poètes connus comme francs-maçons :
Robert BURNS (1759-1796), poète écossais, auteur du célèbre Old Lang Syne. Initié à la loge St David’s LodgeTarbolton ;
Giosuè CARDUCCI (1835-1907), poète italien qui renouvelle la poésie italienne. Initié en 1862 dans la loge Concorde humanitaire, Bologne. Puis membre de la loge Falsienea et de Propaganda ;
Jacques CAZOTTE (1719-1792), auteur de contes et de fables, membre des Élus Cohens de l’Univers (Martinès de Pasqually) ;
Marie-Joseph-Blaise CHÉNIER (1764-1811), poète officiel de la révolution, Académie française, initié à la Loge Les Neufs Sœurs, Paris ;
Jean-Baptiste CLÉMENT (1836-1903), initié à la Loge Les Rénovateurs, auteur du Temps des cerises ;
Abbé Jacques DELILLE (1738-1813). Poète qui a traduit les œuvres de Virgile. Membre de l’Académie française. Initié à la loge Les Neufs Sœurs, Paris ;
Louis-Emmanuel DUPATY (1775-1851), poète initié à la Loge La Vraie Harmonie, Paris. Auteur de L’Art poétique des demoiselles et des jeunes gens ;
Pierre DUPONT (1821-1870), poète ayant eu un prix à l’Académie française ;
Johann Wolfgang GOETHE (1749-1832). Poète allemand, auteur de Faust. Initié à la loge Amalia zu den drei Rosen, Weimar ;
Clovis HUGUES (1851-1907). Poète et journaliste, il combattit dans les rangs de La Commune. Initié à la Loge La Parfaite Union, à Marseille ;
Rudyard KIPLING (1865-1936). Poète et romancier qui a créé le poème Si, ainsi que Le Livre de la Jungle. Prix Nobel en 1907. Initié à la loge Hop and Esperance Lodge 782, Lahore ;
Charles-Gabriel de LATTEIGNANT (1697-1779), poète qui a publié dans La Lyre maçonnique de 1813, initié à la Loge Grand Orient, à Paris ;
Antoine Marin LE MIERRE (1723-1793), poète et membre de l’Académie française, initié à la Loge Les Neuf Sœurs, Paris ;
Stéphane MALLARMÉ (1842-1898), poète, franc-maçon incertain, il est reconnu comme maître du symbolisme et de l’hermétisme ;
Jean-François MARMONTEL (1723-1799). Poète et membre de l’Académie française, initié à la Loge des Neuf Sœurs, Paris ;
Louise MICHEL (1830-1905), auteure qui a laissé d’innombrables œuvres, dont poétiques, initié à la Loge La Philosophie sociale, Paris ;
Claude-Hubert MILLEVOYE (1782-1816), poète, initié à la Loge L’Épis d’or, à Paris ;
Gérard de NERVAL (1808-1855), poète mais franc-maçon incertain ;
Eavriste Désiré de PARNY (1753-1814), poète et de l’Académie française, initié à la Loge Les Neufs Sœurs, à Paris ;
François PONSARD (1814-1867), poète et membre de l’Académie française, nous ne savons pas de quelle loge il était ;
Eugène POTTIER (1816-1887), poète et auteur de chansons, comme L’Internationale, initié à New York, il mourut quelques jours avant son affiliation en France ;
Alexandre Sergueïevitch POUCHKINE (1799-1837). poète russe considéré comme le fondateur de la littérature russe. Initié à la loge Ovide, Kischinev ;
Jonathan SWIFT (1667-1745). Poète irlandais, auteur des « Voyages de Gulliver ». Initié à Londres
Brève bibliographie de la poésie maçonnique :
- Lina Chelli, Vibrations maçonniques, Prudent Pigeon Publishing, 2014 ;
- Lina Chelli, Vibrations maçonniques 3,5,7 et autres, autoédition, 2018, ;
- Florence Ferrari et Patrick Simon, À l’orient des rêves, Éditions du Tanka Francophone, 2019 ;
- Jean-Antoine Maxence et Élisabeth Viel, Anthologie de la poésie maçonnique et symbolique, éditions Dervy, 2007.