Blog d'étude critique et académique du fait maçonnique, complémentaire de la revue du même nom. Envisage la Franc-Maçonnerie comme un univers culturel dont l’étude nécessite d’employer les outils des sciences humaines, de procéder à une nette séparation du réel et du légendaire et de procéder à la prise en compte de ce légendaire comme un fait social et historique.
Deux études parues en novembre 2019 permettent de revenir sur le terrorisme islamiste en tentant une approche quantitative. « Les attentats islamistes dans le monde 1979-2019 » de la Fondation pour l’innovation politique (Fondapol) propose un panorama mondial et « La réalité de la menace djihadiste en France 2015-2018 » de Xavier Crettiez (Sciences-Po Saint-Germain-en-Laye) et Yvan Barros (Fondation Jean Jaurès) s’intéresse plus précisément au cas français.
« La réalité de la menace djihadiste en France 2015-2018 » de Xavier Crettiez et Yvan Barros
L’étude menée à partir d’articles de la presse nationale et régionale, revient sur les années 2015-2018 avec 88 projets d’attentats enregistrés dont 13 aboutis, 17 échoués et 58 déjoués, impliquant 163 individus et faisant 251 morts et plus de 900 blessés ! Alors que certains justifient le terrorisme par l’action de l’État ou des forces armées, cette violence indiscriminée touche presqu’exclusivement des populations civiles. Par ailleurs l’immense majorité des auteurs d’attentats décèdent traduisant leur dessein mortifère.
Essai de sociologie des djihadistes en France
Le profil des djihadistes est surtout masculin. Les femmes sont un peu plus présentes dans les attentats à l’explosif ou à l’arme blanche, les hommes étant largement majoritaires dans les attentats avec armes à feu. De plus les femmes sont plus souvent converties que les hommes mais ont plus rarement des antécédents judiciaires.
Plus de la moitié des terroristes recensés ont moins de 25 ans et 16% sont mineurs. Cet âge moyen ne baisse pas, contrairement à une idée reçue, mais augmente légèrement. Une grande majorité possède la nationalité française.
L’origine géographique permet de constater un lien « entre la présence de candidats au djihad et les territoires à forte densité de quartiers populaires et de populations immigrées. » Mais la distribution tend à être plus éclatée avec des zones rurales (Gers, Aude, Doubs, Indre-et-Loire) et des zones « riches même si densément peuplées de populations immigrées » (Savoie). L’internet permet ce genre de recrutement sans lien avec une quelconque réalité musulmane, ni une présence salafiste.
La maîtrise de la violence acquise dans la délinquance ne concerne vraiment que les auteurs d’attentats aboutis. Les difficultés dans l’enfance sont un facteur qui devrait être confirmé, mais l’échantillon étudié est trop réduit.
Les processus d’engagement violent
L’engagement est rarement une pratique solitaire, mais plutôt celle d’un groupe ou d’une fratrie. Les acteurs solitaires sont donc quasi inexistants. L’engagement s’inscrit bien plus dans la lignée des violences politiques traditionnelles commandées et organisées par des entrepreneurs de cause.
L’internet permet d’acquérir des connaissances sur le combat djihadiste, des informations sur les voies d’accès au califat, l’obtention d’armes ou la fabrication de bombes. Il est aussi le vecteur d’intégration dans une communauté émotionnelle, dans une fraternité virtuelle. Mais l’engagement repose majoritairement sur des rencontres physiques (la prison, la famille, le lieu de culte, les groupes affinitaires). Il faut noter que la radicalisation par une expérience en zone de conflit est ultra-minoritaire.
L’étude conclut à l’absence de « régularités types » même si des éléments récurrents demeurent comme la disponibilité biographique des acteurs violents ; l’insertion dans des réseaux ; la rareté des profils isolés ; l’usage des nouvelles technologies pour s’acclimater à la violence ; la dispersion géographique ; la domination masculine ; un rapport certain à l’islam salafiste...