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Blog d'étude critique et académique du fait maçonnique, complémentaire de la revue du même nom. Envisage la Franc-Maçonnerie comme un univers culturel dont l’étude nécessite d’employer les outils des sciences humaines, de procéder à une nette séparation du réel et du légendaire et de procéder à la prise en compte de ce légendaire comme un fait social et historique.

Lire et relire | « L’identité, c’est la guerre » de Roger Martelli

Jean-Pierre Bacot

« L’identité, c’est la guerre ! » Roger Martelli s’emploie dans son ouvrage à démontrer que la crispation identitaire, symptôme de plus en plus fréquemment repérable, conduit très souvent à des conflits, principalement entre proches, les guerres civiles étant réputées être les plus cruelles. L’auteur, qui vient d’un communisme qu’il a quitté, courant qui fut en France si puissant et dont il a longuement analysé le déclin, n’a pas pour autant cessé de réfléchir sur les conditions d’existence d’un nouveau progressisme. Il est également l’un des animateurs du groupe d’historiens qui travaillent sur les Communes de 1871. Cela permet d’imaginer ce que peuvent être aujourd’hui les Versaillais dont le comportement fut inhumain.

Animateur de la revue Regards, agrégé d’histoire, Roger Martelli a publié plus d’une vingtaine de livres et des dizaines d’articles. L’ouvrage dont nous parlons ici, date de 2016. Il est publié par les éditions « Les liens qui libèrent » et mérite d’être lu et relu, tant il fait écho à ce que l’on vit aujourd’hui à l’échelle planétaire, comme au plus près de nos existences. L’un des apports majeurs de ces pages denses et d'une écriture limpide est de montrer comment les forces progressistes, en France comme ailleurs, se sont laissées happer par ce thème piégé, et ce aux dépends de la notion de lutte de classes que l’auteur juge de plus en plus opérante.

L'historien construit une généalogie du concept d’identité, de son développement et de sa circulation. La principale figure de cette notion mortifère est aujourd’hui, comme hier, celle du nationalisme, portée essentiellement, mais pas uniquement par l’extrême-droite . Pour Roger Martelli, cela « ne se discute pas, mais se combat ». « Toute autre posture quelles qu’en soient les intentions, revient à mettre le doigt dans un engrenage destructeur », ajoute-t-il avec raison.

Comme chacun le sait, le thème de l’identité, nationale, régionale, ethnique, sexuelle, religieuse ou autre, s’est petit à petit imposé, bien au-delà de sa zone d’origine. Roger Martelli est sur ce point en accord avec ce que Philippe Corcuff définit dans un ouvrage récent comme une « grande confusion » venue par contagion des théories de l’extrême droite, laquelle nous annonce que la  morale, la chrétienté, la nation et même l’Occident, seraient menacés de délitement et qu’il conviendrait donc de faire retour en un « chez nous » protecteur et rassurant, mais forcément hostile à d'autres.

Tout cela est construit autour d'une peur qui envahit insidieusement les imaginaires. L'auteur considère ce qu’il appelle le « désir rassurant de la clôture » comme éminemment dangereux. S’il nous faut assumer une appartenance de groupe, autant faire en sorte qu’elle soit tolérante. La guerre, et même l’affrontement entre groupes, ne relèvent pas d'une fatalité et il nous faut revenir à une recherche de l’égalité, même si le soviétisme a pu jadis en dégoûter plus d’un. Sans une réflexion permanente sur cette égalité des humains en tant que tels, la liberté n’est que formelle et sans une intégration des problématiques sociales à notre  réflexion, nous risquons, comme trop de nos contemporains, de nous laisser guider par l’air maussade du temps. Il faut faire preuve de volontarisme et en rabattre sur nos spécificités.

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