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Blog d'étude critique et académique du fait maçonnique, complémentaire de la revue du même nom. Envisage la Franc-Maçonnerie comme un univers culturel dont l’étude nécessite d’employer les outils des sciences humaines, de procéder à une nette séparation du réel et du légendaire et de procéder à la prise en compte de ce légendaire comme un fait social et historique.

"Brasero", l’histoire des contres et passage par la Librairie Quilombo

Jean-Pierre Bacot

Avec un grand format (22x29 cm), des textes cinglants et des illustrations de haute qualité, Brasero, publication annuelle vendue 22 euros et éditée par L’Échappée, tranche dans l’univers des revues en général et dans le très riche univers des publications libertaires. Plutôt que de la contre-histoire dont ce bel objet se réclame, nous préférerons parler dune sorte d"histoires des contres". Il ne s’agit pas pour nous de jouer sur les mots, mais la notion invoquée par les braséristes relève le plus souvent d’un complotisme qui est d’ailleurs étrillé dans une note de lecture de ce numéro 2 (Les idées fausses ne meurent jamais de Stéphanie Courouble-Share, par Charles Jacquier.

Il s’agit plutôt d’une mise en valeur des marges. Le numéro 1, sorti en novembre 2021, est radicalement épuisé, les 2.500 exemplaires (excusez du peu) ayant été rapidement écoulés. On nous a dit qu’il ne serait pas re-tiré et la spéculation a commencé, puisqu’un exemplaire est proposé à 234 euros ! Nul n’échappe à la logique libérale… Le numéro 3 est en préparation et sortira à l’automne.

Le n°2 (2022), que nous venons de recevoir, fourmille de pépites. Les éditions l’Échappée, dirigées par Cédric Biagini et Patrick Marcolini, attaquent cette édition avec une étude d’Anne Steiner sur « l’Enfance insoumise, fugueurs et vagabonds sous la IIIème République ». Autre proposition intéressante, un rappel par Jean-Christophe Angaut et Anatole Lucet de ce que fut dans les années 1900-1930 l’organisation de jeunesse allemande des Wandervogel (oiseaux de passage), une forme de scoutisme au fonctionnement ambigu.

On croisera également dans ce numéro des bandits sociaux portugais, le bref mouvement antitotalitaire qui suivit mai 68 et sa version belge, des nouvelles de la chasse au rats dans le Paris des années 1920, la vie de Guido Keller adepte d’une forme de fascisme et des expériences extrêmes, Pablo Neruda entre amour et politique, le chic m’as-tu-vu des voyous apaches 1900, l’invasion des communistes télépathes, des bateaux-manèges tirés par des chevaux, deux préfigurations de l’écologie, des divas de la cravache, le Paris perdu des écrivains du faubourg et le goût qui fut celui de Charles Péguy pour la typographie. Cela nous donnera l’occasion d’insister sur la qualité remarquable des illustrations de cette revue Brasero : dessins, gravures, documents anciens judicieusement choisis, sous la houlette de Jacques Aubertin.

Histoire, écologie, mouvements sociaux, figures de proue : Madeleine Peltier féministe, Cornelius Castoriadis philosophe, Eric Losfeld, éditeur, Christine Sèvres, chanteuse, Noël Godin, agitateur, Bhagat Singh, martyr athée de l’indépendance indienne, le panorama est large et varié des empêcheurs et empêcheuses de tourner en rond.

Nous noterons enfin un petit chef-d’oeuvre d’écriture et d’illustration signé Zvonir Novak sur « les hystéro-trotskistes, le graphisme des enfants du prophète », avec d’étonnantes représentations de ce que l’auteur appelle le paléo-trotskisme « qui se spécialise dans l’image batailleuse qui canarde », une imagerie emprunte de jeunisme qui n’est pas sans rappeler celle qui caractérisa également le fascisme italien.

Nous avons également reçu La feuille, publiée en huit pages de fort papier et au format berlinois (celui des quotidiens comme Libération), offerte par la Librairie Quilombo de la rue Voltaire à Paris. C’est l’équipe de cette librairie qui a rédigé les textes là-aussi magnifiquement illustrés par des dessins, des gravures sur bois et des photos de couvertures de livres. Elle met notamment en valeur les éditions du bout de la ville et celles du Typhon, sises à Marseille, avec leur collection « Après la tempête ». On mesure avec ces publications la vigueur des éditions libertaires, pour la plupart dotées aujourd’hui d’une dimension écologiste et dont nous aurons à présenter ici d’autres exemples.

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