Blog d'étude critique et académique du fait maçonnique, complémentaire de la revue du même nom. Envisage la Franc-Maçonnerie comme un univers culturel dont l’étude nécessite d’employer les outils des sciences humaines, de procéder à une nette séparation du réel et du légendaire et de procéder à la prise en compte de ce légendaire comme un fait social et historique.
Les ordres de sagesse du rite français sous le Consulat et au début de l’Empire.
Barbara de la Motte Saint-Pierre
Cet article traite du réveil des ordres du Grand Orient de France après les Révolution et sous le Consulat. Il est souvent véhiculé que les Ordres Français ont cessé d’exister à la Révolution. Il n’en est rien et nous étudions leur réveil tel que le décrit le Procès-verbal de la Chambre des Grades disponible à la BNF sous la cote FM1 60. Cette Chambre était chargée par le Grand Orient de répondre aux demandes de reconstitution provenant de la France entière comme de l’international, des récentes conquêtes de la République comme d’Amérique ou même de Batavia (l’actuel Djakarta). Nous analysons le soin pris par le Grand Orient dans l’octroi de ses constitutions de réveil des chapitres, tant géographiquement que diplomatiquement. Et tenteront de comprendre à quel besoin social répondaient ces refondations.
Un contestataire à l’orient. Bègue-Clavel et ses publications, 1844-1845.
Jean-Pierre Bacot
Ecrivain et éminent vulgarisateur, Timoléon-François Bègue-Clavel aura été pendant deux années uns sorte de poil à gratter de la maçonnerie française et du Grand Orient en particulier. Auteur de plusieurs ouvrages encyclopédiques et illustrés traitant de la maçonnerie, des sociétés secrètes et des religions, Clavel a aussi été éditeur d’une revue l’Orient qui fut d’abord une sorte d’almanach maçonnique donnant foule de renseignements sur les loges et les obédiences en France et à l’étranger. Mais l’Orient fonctionna également comme machine de guerre pour une démocratisation de la maçonnerie dont la préoccupation traversait alors également les loges du rite écossais dont Clavel avait été membre dans sa jeunesse. Il mobilisa aussi pour une rubrique de contes maçonniques un petit groupe d’écrivains.
Une littérature maçonnique? Marie Aycard et ses collègues et frères écrivains. Orientations de recherche.
Jean-Luc Buard
En identifiant un réseau d’écrivains franc-maçons dans les années 1840, à travers leur collaboration à la revue l’Orient où ils publient des nouvelles d’inspiration maçonnique, l’article met en relief les conditions techniques de cette exploration socio-historique. En insistant sur l’accès que l’Internet permet désormais à des sources mises en ligne et sauvées par là même de l’oubli, il montre comment il est désormais possible de pister les reprises d’article, les traductions et les relations interpersonnelles, tout ce qui a tissé un réseau à la fois professionnel et fraternel. Au centre de cette configuration plusieurs hommes de lettres, éditeurs et imprimeurs comme Marie Aycart, X. Pagnerre et François Bègue Clavel émergent et feront l’objet d’autres recherches.
Un écrivain sans tablier. Octave Mirbeau et la Franc-maçonnerie
Jean-Pierre Bréhier
Qui se souvient d’Octave Mirbeau ? Il serait définitivement passé aux oubliettes de l’Histoire si une armée de spécialistes, de passionnés ne l’avaient tiré de là, rebaptisé en Imprécateur au cœur fidèle. Son parcours passe par la case Anarchie : sa seule arme aux effets dévastateurs, sa plume de journaliste, son encre, le vitriol. La Franc-maçonnerie ne lui était pas étrangère ne serait-ce que par le nombre de ses amis porteurs du tablier et, dreyfusard de choc, il participa, pour la défense du capitaine à une manifestation dans le temple de la rue Cadet. Cependant, conjuguer Mirbeau et la Maçonnerie demeure une gageure. La présenté étude se propose de reconsidérer l’homme, son œuvre, sous la lunette à la fois maçonnique et mirbeauphile.
Le crime est éternel et fait partie de l’homme. Sur le polar maçonnique.
Clara Safronia
Si l’on excepte une préfiguration au milieu du XIXe siècle, le polar maçonnique est apparu avec le nouveau millénaire. Il relève d’une diversification d’un des modèles les plus solides de la littérature populaire dont les sociologues ont montré comment il répondait à un besoin de conforter l’ordre social. L’auteure pose également un parallèle avec le conte de fées. Participant d’une certaine banalisation de la maçonnerie, ce sous-genre qui n’avait encore jamais été étudié possède déjà ses auteurs-phare. Une bibliographie chronologique montre que le nombre de titres paraissant chaque année est constant. L’article pointe également la faible présence des femmes aussi bien parmi les auteurs que dans le contenu des romans, et le fait que ces derniers soient très souvent écrits à quatre mains.
De la Femme aux femmes quelle initiation ?
Anouk Leven
Critiquant fortement ce qu’est encore l’attitude de maçons de sexe masculin travaillant entre eux vis-à-vis des femmes qu’ils considèrent au mieux avec condescendance et dont ils semblent se méfier, traquant ce qui demeure encore comme poncifs en la matière, l’auteure refuse également une généralisation de la mixité, parallèlement à l’évolution de la société. Elle insiste particulièrement sur la résistance qui demeure dans la grande majorité des structures mixtes à refuser la féminisation du langage. A partir de ces deux constats, elle prône le maintien de structures maçonniques féminines, les seules qui soient à ses yeux de nature à préserver leurs membres à la fois du mépris de certains hommes et d’une masculinisation sous l’égide d’un neutre en réalité masculin.