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Blog d'étude critique et académique du fait maçonnique, complémentaire de la revue du même nom. Envisage la Franc-Maçonnerie comme un univers culturel dont l’étude nécessite d’employer les outils des sciences humaines, de procéder à une nette séparation du réel et du légendaire et de procéder à la prise en compte de ce légendaire comme un fait social et historique.

Déclinisme, fracture, identité... Quid en maçonnerie ?

Les contributions postées récemment par Julien Vercel à propos de trois aspects du « mal français », déclinisme, fracture et identité, m’ont inspiré ces quelques lignes, ouvertes, faut-il le dire, au débat, sur ce thème manquant affreusement d’originalité : et la franc-maçonnerie dans  cette logique ternaire?

Commençons par le déclinisme. S’il est une franc-maçonnerie qui décline, c’est celle de la maison mère  britannique et de ses filles anglo-saxonnes, états-uniennes au premier chef. On trouvera à ce propos une analyse statistique fine de cette chute vertigineuse dans le numéro 6 de Critica Masonica qui paraîtra en mai 2015, sous la plume de Ludovic Jeanne. Quant à la déclinaison française de cette maçonnerie dite « régulière », entendons masculine et croyante, il est vraiment curieux que les nombreux commentateurs de sa décomposition/recomposition, actifs notamment sur la toile, n’insistent pas sur le paradoxe qui réside dans le fait que l’on voit des responsables de structures s’étriper et jouer d’un billard international à trois bandes pour ressembler à de futurs survivances vintage subventionnées par les amateurs de patrimoine culturel, comme le seront chez nous bientôt le Jésuites ou les Dominicains. Nous en viendrons plus tard dans la revue à tenter d’analyser ce qui peut se jouer aujourd’hui en Europe centrale et orientale comme écho tardif de ce mode de sociabilité, definitely old fashion, mais qui semble séduire les élites sociales des sociétés post-totalitaires

Continuons par la fracture. Malgré son extériorisation volontariste (conférences annoncées dans Libération, galas de charité, réunions publiques etc.), cette maçonnerie dogmatique à l’ancienne est en complet divorce avec la société d’aujourd’hui, au prix d’une gymnastique mentale sans doute assez délicate pour nombre de ses membres. En revanche, la maçonnerie héritée des Moderns et qui ne refuse pas de parler en loge de  politique et de religion, voire, de facto, le plus souvent, de disserter sur le post-politique et le post-religieux, prépare ses membres à ne pas sombrer trop vite dans ce qui s’annonce comme une période socialement et intellectuellement grise, en proposant vaille que vaille un mode d’être ensemble basé sur une réflexion permanente de ses membres, le travail et le respect réciproque qu’il implique étant conçu comme le ciment de la fraternité. Certes, une telle option, comme les autres, du reste, concerne essentiellement une partie médiane de la société et elle entretient donc quelque part la fracture qui se creuse avec les couches populaires, par ailleurs plus fréquemment croyantes, sans impact sur la fréquente indécence de la partie haute. Entre ces deux visons et pratiques de la maçonnerie, il existe une troisième voie, à la fois libérale et spiritualiste, dont le rôle pourrait sembler être essentiellement de pallier le solde inconsolé du déclin religieux.

Finissons par la question de l’identité. Les trois principales voies de la mise en œuvre d’une appartenance maçonnique sont, dans une évolution et un rapport de forces permanents, en définition de leur identité. Cela passe souvent par un retour aux fondamentaux avec, dans certains cas,  la quête éperdue d’une ancienneté fantasmée. La qualité de la cohabitation entre les variantes de pratique varie selon les époques, la réalité des intervisites, les salons du livre maçonnique constituant à ce titre de bons indicateurs. Le succès de la maçonnerie française tenant en sa diversité,  on peut considérer qu’elle ne possède pas d’identité unique, même s’il existe un plus petit dénominateur commun dont on peut discuter de la taille à l’infini. Elle échappe donc, par cette diversité, à la logique mortifère, que portent nationalismes et particularismes, et dont témoignent les anti-maçons de tout acabit, persuadés que la franc-maçonnerie, toutes tendances confondues, relève d’un complot contre l’identité nationale, catholique et indivisible. Mais comme cette  identité n’existe pas comme bloc, une voie reste ouverte pour une pluralité de conceptions et de pratiques, chacun étant libre de développer les siennes, ce que nous ne manquons pas de faire aussi bien dans la revue que sur ce blog.

Déclinisme, fracture, identité... Quid en maçonnerie ?
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