Blog d'étude critique et académique du fait maçonnique, complémentaire de la revue du même nom. Envisage la Franc-Maçonnerie comme un univers culturel dont l’étude nécessite d’employer les outils des sciences humaines, de procéder à une nette séparation du réel et du légendaire et de procéder à la prise en compte de ce légendaire comme un fait social et historique.
La Grande loge nationale française (GLNF) qui compte plus de 27 000 membres, après en avoir dénombré plus de 40 000 avant la crise de gouvernance qui vit son éclatement en 2012,semble reprendre du poil de la bête. Elle le fait d’autant plus facilement qu’elle a retrouvé depuis juillet 2014 l’onction (la reconnaissance) de la Grande loge unie d’Angleterre, ce qui lui garantit, entre autres points cruciaux, le maintien de son réseau international, notamment africain, pour le meilleur et pour le pire.
Ces 27 000 frères sont répartis entre 1 200 loges qui travaillent à différents rites. Le rite écossais rectifié (RER) fut le premier a être pratiqué à la création de la GLNF en 1948, nonobstant les rites anglo-saxons qui, dans les années de préfiguration (la Grande loge nationale indépendante et régulière pour la France et ses colonies ayant été créée en 1913), avaient eu la préférence des Anglais et Nord-Américains majoritaires dans cette petite obédience. Puis vinrent le rite écossais ancien et accepté (REAA), le rite français, le rite émulation, le rite d’York et le rite standard d’Écosse. Des structures de hauts grades existent pour chacun de ces rites qui ne recrutent qu’à l’intérieur de la GLNF et ne se mélangent pas à leurs équivalents d’autres puissances. On a cependant observé récemment une réunion commune entre le Grand chapitre de rite français et celui du Grand orient, lequel a même transmis une patente, substitutive à une transmission brésilienne peu appréciée rue Cadet.
La GLNF a fêté dignement son centenaire en 2013, sous la présidence de son Grand maître toujours actuel,Jean-Pierre Servel, alors qu’elle n’avait pas encore retrouvé toute son aura. Elle a alors publié un ouvrage de référence, préfacé par le Grand maître : 1913-2013, 100 ans de spiritualité maçonnique. Le livre du centenaire, Paris, GLNF, Scribe). La nouvelle gouvernance de l’obédience,censée la prémunir des dérives passées, ne lui a pas fait perdre une spécificité pas tout à fait démocratique : seuls le vénérable et le trésorier de la loge sont élus par la base, les autres officiers étant nommés par le vénérable après son élection. Il en va de même au niveau national où le Grand maître et le trésorier national sont les seuls à être élus.
Interdisant depuis l’origine, dans le respect des règles maçonniques anglaises, les débats politiques, sociaux et religieux dans ses loges, la GLNF a développé depuis quelques années une politique d’invitation de personnalités à l’occasion de réunions publiques tenues sur des thèmes à dominante philosophique. La loge de recherche parisienne Villard de Honnecourt œuvre en tête de pont de cette activité d’extériorisation.
Les relations avec d’autres obédiences sont aujourd’hui plus détendues qu’auparavant, la GLNF participant par exemple désormais es qualité aux différents salons du livre maçonnique. Quant à l’interdiction de visite dans d’autres loges que les siennes, elle semble s’être adoucie, de facto sinon de jure.
Spiritualiste, marquée davantage à droite qu’à gauche, la GLNF n’en est pas moins détestée par ce qui reste de catholiques intégristes, comme en témoigne cette citation de Pierre Debray : « Elle constitue le pire danger : la paganisation de chrétiens qui ne se méfient pas de ces dangereux alliés, qui, insidieusement, les pervertissent ».