Blog d'étude critique et académique du fait maçonnique, complémentaire de la revue du même nom. Envisage la Franc-Maçonnerie comme un univers culturel dont l’étude nécessite d’employer les outils des sciences humaines, de procéder à une nette séparation du réel et du légendaire et de procéder à la prise en compte de ce légendaire comme un fait social et historique.
Rédac'
Ancien Grand commandeur du Grand collège des rites du Grand orient de France (REAA), Claude Saliceti vient de publier un nouvel ouvrage: La transcendance de l’humain. Plaidoyer pour un humanisme spirituel (Entrelacs, 2017, 12€90), dans lequel il plaide en un peu plus de 70 pages pour un humanisme spiritualiste qui refuserait la coupure établie par les Lumières entre la raison et la spiritualité. Cette réflexion s’inscrit dans une sorte de spiritualisme post religieux dont il ne faut pas être grand spécialiste pour en sentir le parfum écossiste. Comme nous l’avons noté sur ce blog, l’athéisme étant en progrès, mais encore minoritaire en France comme dans d’autres pays et le rapport aux religions traditionnelles étant en voie de délitement, une partie de plus de plus importante de la population va désormais vivre dans cet espace intermédiaire flou que l’on qualifiera faute de mieux de « spiritualiste ». Certes, les plus âgés seront davantage concernés, mais c’est pour une clientèle plus large que, dans cette nébuleuse, des propositions vont émerger, en s’inscrivant pour partie dans des traditions anciennes.
Claude Saliceti commence par une tentative de définition de cette spiritualité qui serait le désir « d’un dépassement dans un illimité, une unité, une permanence, une perfection, une complétude individuelle, qui serait aussi une communion, une fusion dans un Tout et dans l’unité de ce Tout qui les effaceraient » (p.14).
Prenant parti pour le maintien d’une démarche transcendentaliste contre un immanentisme qui règne à son avis négativement depuis deux siècles, l’auteur s’appuie sur les limites d’une science qui en viendrait à douter de sa toute-puissance pour réintroduire une dimension métaphysique. Saliceti parle cependant d’un immanentisme verticalisé dont il pense qu’il serait de nature à conjurer l’« individualisme narcissique ».
Dans la même veine, le livre s’achève sur la nécessité de respiritualiser l’humanisme, en en faisant même une condition de coexistence des États. En coda, on lira un poème de Françoise Saliceti, dans lequel on trouvera ces vers : « Quand l’un se fait pluriel /J’ose croire à l’humain / Qu’il pourra me connaître au delà du paraître/ Et gagnant le Saint des saints / Ou réside l’essentiel (…) ».
Que dire d’un tel plaidoyer ? Que le post-religieux peut prendre bien des formes. Celle-ci plonge à la fois, dans une nostalgie d’un monde occidental d’avant les Lumières, mais qui serait débarrassé de ce dont les dites Lumières nous ont libéré.
Du même auteur, on notera : Humanisme, franc-maçonnerie et spiritualité, PUF, 1997 ; L’Humanisme a-t-il un avenir? Dervy, 2004 ; Candide et le physicien (en collaboration avec Bernard d’Espagnat), Fayard 2008 ; Dictionnaire du questionnement philosophique (avec Bernard Caussain), Entrelacs, 2013.