Blog d'étude critique et académique du fait maçonnique, complémentaire de la revue du même nom. Envisage la Franc-Maçonnerie comme un univers culturel dont l’étude nécessite d’employer les outils des sciences humaines, de procéder à une nette séparation du réel et du légendaire et de procéder à la prise en compte de ce légendaire comme un fait social et historique.
Gérard Bacot
Tout est parti d’un double constat : le public de la musique classique est de plus en plus vieillissant et les jeunes des quartiers ou régions défavorisés ne vont jamais au musée ni au concert.
Pour remédier à cette situation, les orchestres Démos constituent, depuis 2010, une offre culturelle innovante qui rencontre un réel succès. Il s’agit de faire jouer dans un orchestre symphonique des élèves de 7 à 14 ans habitant des quartiers identifiés comme prioritaires de la « politique de la Ville » ou des zones rurales isolées ou insuffisamment dotées en institutions culturelles. Démos a pour but de favoriser la transmission du patrimoine classique et de contribuer à une bonne insertion sociale. On peut donc s’étonner qu’une telle « action de démocratisation culturelle » soit si peu connue et si peu médiatisée.
La pédagogie est pragmatique, centrée sur la pratique musicale en orchestre et ne nécessite aucune initiation musicale préalable. On ne recherche pas l’excellence et on joue avant de lire la musique : le solfège et la partition seront au programme plus tard. L’apprentissage se fait par le corporel (danse) et par le chant. La méthode consiste en une pratique collective par groupes de quinze regroupés en orchestre symphonique d’une centaine d’enfants, encadrés par des professionnels, une fois par mois.
Autre particularité : l’instrument (violon, flûte, violoncelle) est remis gratuitement à chaque enfant lors d’une véritable cérémonie, afin de lui faire comprendre son caractère précieux. En contrepartie, les familles s’engagent à suivre un cycle de trois ans. « C’est donc, disent les responsables, un système soigneusement pensé, pragmatique, exigeant et respectueux ».
Il s’agit d’un « enthousiasmant dispositif de démocratisation culturelle ». Mais c’est un dispositif ambitieux et onéreux qui ne peut se maintenir dans la durée qu’avec le soutien financier de l’état (ministère de la culture), du mécénat et des collectivités territoriales. C’est à Paris et en Ile-de-France que les orchestres Démos sont les plus nombreux, pilotés par la Philharmonie de Paris-Cité de la musique. Mais il en existe dans d’autres villes, métropoles ou régions : Bordeaux (avec l’Opéra de Bordeaux), Montpellier, Lyon (l’Auditorium-Orchestre national de Lyon), Marseille (avec l’Opéra de Marseille), Metz (avec l’Orchestre national de Lorraine), La Réunion (avec la Cité des arts), Mulhouse (en partenariat avec l’Éducation nationale), et d’autres encore.
Cette implantation dans les territoires est une preuve de succès. Mais il en est une autre. Dans une chronique publiée dans Le Monde du 24 juin 2017, Michel Guerrin nous apprend que « à 14 ans, quand il faut quitter Démos, un enfant sur deux s’inscrit dans un conservatoire » ! Et le chroniqueur émet un pronostic qui nous servira de conclusion : « Cette opération a pour but de sauver des enfants, mais on peut se demander si, à terme, ce ne sont pas ces enfants qui vont sauver la musique ».