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Blog d'étude critique et académique du fait maçonnique, complémentaire de la revue du même nom. Envisage la Franc-Maçonnerie comme un univers culturel dont l’étude nécessite d’employer les outils des sciences humaines, de procéder à une nette séparation du réel et du légendaire et de procéder à la prise en compte de ce légendaire comme un fait social et historique.

Stanislas de Guaita, le maître des sciences maudites

Joël Jacques

Cette année 2017 fut riche : les éditions J’ai lu ont réédité la trilogie d’Oswald Wirth, La Franc-maçonnerie rendue intelligible à ses adeptes, au format de poche, mais, partant du principe qu’il vaut mieux s’adresser au Maître qu’à son secrétaire, j’aurais tendance à nettement recommander les rééditions de Stanislas de Guaita dont Wirth fut le secrétaire, justement.

Dans les années 1990, j’ai prêté à un ami, un ouvrage de Stanislas de Guaita, cosigné par Oswald Wirth, son secrétaire. Il s’agissait du livre intitulé Le problème du Mal. L’ami me l’a rendu trois jours plus tard en me disant qu’il n’avait pas pu le lire tant l’ouvrage le rendait mal à l’aise. Le savoir chez lui le rendait inquiet. Il préférait donc me le rendre.

Je l’ai donc replacé avec son alter ego : Au seuil du Mystère, dans ma bibliothèque. Il est donc inutile de préciser mon intérêt pour les écrits de celui qui peut être, aujourd’hui, considéré comme l’un des chefs  de file de l’ésotérisme français de la fin du XIXe siècle, tant il stimula grand nombre de ceux qui en modelèrent la structure et particulièrement celui qui inspira les francs-maçons : Oswald Wirth.

Stanislas de Guaïta est né le 6 avril 1861 dans le château familial d'Alteville, près de Tarquimpol, dans une famille noble d'origine italienne et établie en Lorraine depuis 1800. Après un passage chez les jésuites à Dijon, il fait ses études au lycée de Nancy (1878) où il se lie d'amitié avec le chantre nationaliste Maurice Barrès qui partage avec lui son goût pour la poésie. Il poursuivra ses études à Paris afin d’y obtenir une licence en droit. C’est là qu’il rencontrera certains des poètes du quartier Latin comme Victor Émile Michelet, futur fondateur martiniste avec Papus, Jean Moréas, Laurent Thailhade, Émile Goudeau. De Guaita écrira son premier recueil de vers dès 1881 : Les oiseaux de passage puis La Muse noire (1883) qui révèle son goût pour les œuvres ténébreuses... C’est aussi à cette époque qu’il rencontre Catulle Mendès. Le poète lui fera découvrir Le Dogme et rituel de haute magie d'Éliphas Lévi qui sera une véritable révélation. Fabre d'Olivet et le marquis Saint-Yves d'Alveydre leur ouvriront l'accès à un certain type de connaissances. Il fréquente dès lors Péladan, Éliphas Levi, Papus et les initiés de la maçonnerie, du martinisme et de la Rose+Croix. Il se plongera dans les sciences occultes en ce qu’elles ont souvent de plus noir, la magie, l'alchimie et les ouvrages anciens. Il abandonnera la poésie pour s'initier au mysticisme chrétien et à l'occultisme. Le recueil Rosa Mystica, publié en 1885, propose les derniers vers qu'il écrira avant de ne se consacrer qu’à l'occultisme.

Au seuil du mystère, son premier ouvrage d’occultisme, sera publié en 1886. Il est principalement consacré aux théories sur la Lumière, les lois de la kabbalistique chrétienne. Ce livre constituera le premier volume de ce qui deviendra ses Essais des sciences maudites, un ouvrage qui sera réédité deux fois en 1890 et 1894 et dont les éditions maçonniques de France nous proposent, enfin, aujourd’hui la seconde septaine : Le Serpent de la Genèse. Il s’agit d’une réédition qui ne manquera pas d’enchanter les plus fervents amateurs de symbolisme et de sciences occultes.

Déjà, dans l’avant-propos du Seuil du Mystère, Guaita contestait les moqueries faites à l'encontre de la Haute magie et soulignait que cet art, plus que science, ne se composait pas de divagations plus ou moins spirites, mais s'inscrivait dans la droite ligne des questions posées par la Kabbale juive. En 1894, son préliminaire sera accompagné de deux pentacles extraits de l'Amphitheatrum Sapientiae Aeternae (Amphithéâtre de l’Éternelle sagesse) de Henry Kunrath, une œuvre majeure de la mouvance rosicrucienne du Cénacle de Tübingen. Il y adjoint aussi, bien évidemment, une somme d’informations concernant le martinisme et ses liens avec la Rose-Croix. C’est l’un de ces pentacles que l’on retrouve ici sur la présente édition. Dans Le temple de Satan, paru en 1891, il retracera l'affaire Boullan, cet Abbé, grand ami de Joris-Karl Huysmans et qui lui inspira le personnage du Docteur Johannès dans son célèbre ouvrage, Là-Bas (1891), fut condamné pour satanisme et exercice illégal de la médecine. Le prêtre mourra à Lyon en 1824 non sans accuser Stanislas de Guaita et Oswald Wirth d’avoir usé contre lui d’une magie noire qui lui fut fatale.

Ainsi, dans premier volume du Serpent de la Genèse, Guaita traitera de la magie noire et de l'utilisation des forces occultes comme une mise en scène, une suite à cette affaire.

Stanislas de Guaita terminera la trilogie sur les sciences occultes par La Clé de la magie noire, seconde septaine du Serpent, ouvrage qui nous est proposé par les éditions maçonniques de France, c’est un survol de la sorcellerie à travers les âges et les continents les plus souvent référencés par les symbolistes et occultistes de l’époque. Le problème du mal (1897) livrera des connaissances sur la force astrale et les occultistes mais il ne le terminera pas puisqu'il décèdera prématurément à l'âge de 36 ans, intoxiqué par les stupéfiants qu’il utilisait pour lutter contre la souffrance que lui infligeait ses problèmes rénaux, le 19 décembre 1897. C'est son secrétaire, Oswald Wirth, qui achèvera cette œuvre, comme il publiera, sous son nom, un Tarot, composé, à l’origine par Guaita et qui est toujours édité à l'heure actuelle sous le nom de Tarot de Wirth…

Comment saluer l’arrivée en librairie de La Clef de la Magie noire sinon en recommandant chaudement son étude par tous les passionnés de sciences occultes ? Tout aussi bien, lisez-le, l’énergie qui s’en dégage est puissante.

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