Blog d'étude critique et académique du fait maçonnique, complémentaire de la revue du même nom. Envisage la Franc-Maçonnerie comme un univers culturel dont l’étude nécessite d’employer les outils des sciences humaines, de procéder à une nette séparation du réel et du légendaire et de procéder à la prise en compte de ce légendaire comme un fait social et historique.
Jean-Pierre Bacot
Dorine Bregman, ça ne vous dit rien ? Cette sociologue, aujourd’hui directrice de la communication de la Cour des comptes a jadis, en 1989, lancé une idée simple : l’effet d’agenda. De quoi s’agissait-il ? De noter que, finalement, le plus important pour les leaders d’opinion n’était point tant de construire ce que les gens devaient penser, mais à quoi ils devaient penser ( « La fonction d’agenda, une problématique en devenir », Hermès, n° 4, 1989).
À écouter attentivement les médias variés et avariés au lendemain de la manifestation parisienne du samedi 5 mai- pour « La Fête à Macron », laquelle eut quelques annexes en province, notamment à Toulouse, plus un mot ou presque dans le discours dominical, sinon pour comparer les incidents avec ceux de la manifestation du 1er mai et les suites judiciaires des quelques arrestations. Pour ce qui s’était passé socialement et politiquement la veille, les commentateurs étaient en congé.
Il ne s’agit pas pour nous de prendre parti pour telle ou telle composante, au contraire, nous allons le voir. Derrière une France insoumise qui avait fort bien organisé l’affaire, au demeurant intelligemment cadrée par la préfecture de police, il y avait des petits groupes de « Générations » de Benoit Hamon, des membres du Nouveau parti anticapitaliste (NPA), du Parti communiste français (PCF), des anarchistes libertaires, des militants de la Confédération générale du travail (CGT), d’autres de Solidaires, unitaires, démocratiques (SUD), des zadistes et des dizaines de milliers de non-encartés, tout ce monde souriant de trouver enfin quelque chose qui évite de choisir entre la droite « En marche » et la droite des Républicains et affirmant quelque chose comme un petit espoir, alors même que l’on commémore Mai 68.
La dite France insoumise semble cependant bien fragile. En effet, la sortie de Jean-Luc Mélenchon, pourtant formé par les trotskistes lambertistes puis la gauche socialiste, à propos du « Black block » qualifié d’extrême droite, a jeté un nouveau froid sur le personnage, juste avant que son bras droit poste sur Tweeter une photo de manifestation erronée et qu’à la télévision des député/es de la France insoumise que nous ne nommerons pas par pure charité fassent preuve de leur incurie. Mais la nature a horreur du vide. L’alternative de la gauche social-démocrate est déliquescente, une partie de la droite s’apprête à rallier En marche aux élections européennes (à ce propos que personne ne se plaigne s’il ne va pas voter dans un an), une autre lorgne vers le Front national.
Quoi que l’on pense de tout cela, il convient, ce nous semble, d’en parler, comme de tas d’autres sujets chassés par l’actualité à peine sont-ils advenus. Non pas pour hurler contre des médias qui seraient à la solde du pouvoir. Ce serait difficile par exemple pour BFM qui, dimanche soir, diffusait un reportage « Macron à l’Élysée, le casse du siècle » (de Pauline Revenaz et de Jérémy Trottin), largement à charge. Ce que le macronisme accentue, dans le tourbillon dénoncé par certains de ses proches, c’est le fait qu’une nouvelle chasse de plus en plus vite la précédente et que ce qui se gère relève bien d’un agenda.
En matière d’actualité, comme pour une certaine évolution de la musique, nous sommes confrontés à une sorte de Play List, autant dire le sommaire des conversations de bistrot. Certes, il existe des loges pour prendre du recul, mais premièrement, tout le monde n’est pas maçon, et deuxièmement, nombre de loges refuseront de parler de ce qui se passe dans la cité.