Blog d'étude critique et académique du fait maçonnique, complémentaire de la revue du même nom. Envisage la Franc-Maçonnerie comme un univers culturel dont l’étude nécessite d’employer les outils des sciences humaines, de procéder à une nette séparation du réel et du légendaire et de procéder à la prise en compte de ce légendaire comme un fait social et historique.
Jean-Pierre Bacot
Les études sociologiques, les livres historiques, les textes militants et les romans consacrés à la ville de Marseille se multiplient depuis plusieurs mois. Mais Marseille en résistances, sous-titré Fin de règnes et luttes urbaines, du socio-anthropologue Michel Peraldi et du journaliste, écrivain et scénariste Michel Samson (éditions La Découverte) doit être mis au dessus du panier, soit dit sans mauvais jeu de mots à propos de ce quartier rebaptisé Mistral dans la série télévisée Plus belle la vie. Michel Peraldi et Michel Samson sont en effet de fins spécialistes de Marseille et ont déjà produit de nombreux travaux, mais ils parviennent ici à mettre une approche scientifique dans une totale lisibilité, au service de celles et ceux qui vivent localement un moment chaud et dévoreront cet ouvrage heuristique.
Les deux auteurs proposent en effet une lecture originale de ce qui se passe dans la deuxième ville de France depuis cet événement dramatique qui vit, le 5 novembre 2018, huit personnes mourir dans l’effondrement d’un immeuble du centre-ville, rue d’Aubagne. C’est en effet un nouveau mode de sociabilité et de révolte qui est en passe de s’inventer face à des dominants de plus en plus cyniques, soulignent-ils. Ils considèrent en effet que les pouvoirs politiques et administratifs sont dans le déni d’une souffrance sociale qui ne cesse de croître, quelque 4 000 personnes ayant été expulsées de leur logement
Tout est analysé dans ces pages éclairantes, dont une évidente féminisation du personnel politique marseillais, le fonctionnement des diverses tendances, parmi lesquelles certaines sont hors sol et/ou décomposées, ainsi que les nouvelles formes de solidarité qui se construisent vaille que vaille, appuyées par des milliers de bénévoles.
Les prochaines échéances électorales vont être scrutées à la loupe dans une ville dont les auteurs espèrent qu’elle se reconfigurera, en partie grâce à une population émigrée de l’intérieur de plus en plus importante, nonobstant les Italiens qui affluent, le tout structurant une petite bourgeoisie à dominante intellectuelle relativement absente d’un paysage sociologiquement assez binaire, mais en voie d’évolution. Cet ouvrage étant une sorte de chronique d’une décomposition, les auteurs comptent sur une révolte pour nettoyer les écuries, à partir d’une colère dont ils soulignent qu’elle vient de loin, sans que les éléments d’une éventuelle recomposition apparaissent à l’horizon, l’heure étant encore à la résistance.
