Blog d'étude critique et académique du fait maçonnique, complémentaire de la revue du même nom. Envisage la Franc-Maçonnerie comme un univers culturel dont l’étude nécessite d’employer les outils des sciences humaines, de procéder à une nette séparation du réel et du légendaire et de procéder à la prise en compte de ce légendaire comme un fait social et historique.
Raphaëlle Jullian
Dès que les libraires rouvriront, ne boudez pas votre plaisir : offrez-vous ou faîtes-vous offrir Frans Masereel, l’empreinte du monde (Préface d’Éric Drooker, contributions de Samuel Dégardin et Joris van Parys, éditions Martin de Halleux, 2018). Bien sûr, vous pouvez le commander sur le site des libraires indépendants, mais vous vous privez alors de manipuler depuis la librairie jusqu’à chez vous ce magnifique ouvrage de 664 pages ! Rien que le trajet, cela compense ces semaines où vous avez procrastiné sans vous mettre enfin à la gymnastique dans votre salon.
Cette monographie de 391 œuvres gravées de 1917 à 1971 retrace, en noir et blanc, la vie et l’œuvre de Frans Masereel (1889-1972) .
Aucun texte dans ce pavé de gravures, hormis ceux des contributeurs puisque Frans Mazereel creusait ses bois pour livrer des histoires faites d’images sans légende, ni bulle. Comme l’écrit Samuel Dégardin : « il fut peut-être l’un des meilleurs ʺromanciersʺ de son temps ». Ce qui peut paraître étonnant quand Frans Masereel affirmait : « Je n’aurais jamais écrit mes mémoires, j’en suis certain, pour la bonne raison que je me sens très peu écrivain et que finalement, cela m’ennuie d’écrire. » Et pourtant quel romancier en effet ! Il commence son œuvre par les « questions sociales », puis s’inspire de son autobiographie, avant de puiser dans son imagination.
Né à Blankenberge dans une village de pêcheurs au nord d’Ostende, il dessine dans différents journaux. Pendant la première guerre mondiale, il est objecteur de conscience et illustre des organes pacifistes. Ses premières publications débutent dès la fin de la guerre et c’est en 1920, qu’il raconte Idée, sa naissance, sa vie, sa mort. Sa dernière gravure, Un original, date de 1971, elle n’est pas, pour une fois, réalisée sur bois, mais sur lino. Il meurt l’année suivante en ayant toujours refusé toute étiquette et décliné tout adhésion et surtout en laissant une prodigieuse œuvre de gravures sur bois, précurseur du roman graphique sans paroles.