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Blog d'étude critique et académique du fait maçonnique, complémentaire de la revue du même nom. Envisage la Franc-Maçonnerie comme un univers culturel dont l’étude nécessite d’employer les outils des sciences humaines, de procéder à une nette séparation du réel et du légendaire et de procéder à la prise en compte de ce légendaire comme un fait social et historique.

Les traditionalistes ne sont jamais en retard

Jean-Pierre Bacot

 

Le numéro 195-196 de Renaissance traditionnelle vient de paraître. Comme le note avec humour dans l’avant-propos Pierre Mollier, « nous avons toujours été un peu en dehors du temps profane. » Personne n’en voudra à la fine équipe de cette revue de haute qualité, surtout en ces temps incertains, d’avoir un peu de retard. Réjouissons-nous surtout que nos amis,  Paul,  les deux Pierre et Roger, si différents qu’ils soient de nous, mais en qui nous sentons la même exigence que nous tentons de mettre en œuvre, aient survécu à cette crise qui aura laissé sur le carreau nombre de revues et maisons d’édition.

 

Ce sont trois maçons à la fois marginaux et hors du commun qui ont les honneurs de résultats de recherche ici retranscrits : le Duc de Wharton, Cagliostro et Lazare Lenan.

 

Bernard Homery s’appuie sur une documentation considérable pour tracer le portrait du Duc de Wharton qui fut le premier Grand-maître de la Grande loge de Londres en 1723. Mais il n’existe que des probabilités pour ce qui aurait constitué de sa part un parrainage de la très jeune maçonnerie française, alors que le Duc, passablement désargenté et en délicatesse avec les autorités de son pays natal, séjourna à Paris en 1728.

 

Reinhard Markner, dans un papier traduit de l’allemand par Lionel Duvoy et David Dehoorne s’attaque au personnage sulfureux que fut Cagliostro (Giuseppe Balsamo) : «  Dans le viseur des francs-maçons, la première dénonciation de Cagliostro et de ses auteurs. » Ce pamphlet est attribué à Johan Joachim Christoph Bode qui se moque de celui qu’il faut bien considérer comme un escroc talentueux, qui visita toutes les cours d’Europe et servit de père spirituel à la maçonnerie dite égyptienne.

 

Quant à Lazare Denain, le moins connu de ce trio, Benjamin Barret le considère comme un mage de génie. Né à Parisis en 1793, mort à Amiens en 1877 républicain en 1848, il fut un grand collectionneur de documents consacrés aux sciences occultes. Sa reconnaissance par les milieux spécialisés fut posthume. Ainsi en alla-t-il par exemple de sa  Science cabalistique ou l’art  connaître les bons génies, publiée en 1823, alors que l’auteur avait de la peine à survivre.

 

Vient ensuite une variation de Jacob Perlman sur « Les âges du monde » où il envisage les calendriers maçonniques, les chronologies, l’histoire sacrée, en bref  la manière dont les rituels maçonniques de différents grades se sont appropriés l’aspect diachronique. Quoi qu’il en soit, le temps est en quelque sorte suspendu avant que les travaux de loge ne s’ouvrent et après qu’ils se sont fermés, il se referme. Toute maçonne, tout maçon sait que se trouver aujourd’hui en 6020 n’a pas grands sens, sinon symbolique.

 

Le numéro se termine par une très intéressante étude de Hugues Berton et Christelle Imbert, spécialistes du compagnonnage, sur l’Association ouvrière des Compagnons du devoir et du tour de France, laquelle, en 1940 se  jeta dans les bras du Maréchal Pétain. Joseph Bernard (1908-1994), avec la complicité de l’abbé Joseph Rambaud, sulpicien, docteur en théologie, « Conseiller aux règles » (1903-1951), fut le grand ordonnateur de cette véritable honte. Les deux personnages se sont sans doute connus à Lyon dans des milieux catholiques proches de l’Action française. Une charte du compagnonnage, démaçonnisé, déjudaïsé dans ses références, Hiram passant en particulier à la trappe, fut approuvée par Philippe Pétain le premier mai 1941 dans les termes suivants : « J’accorde aux Compagnons du devoir du tour de France cette charte du compagnonnage, afin de leur permettre de faire revivre les traditionnelles et séculaires vertus d’une chevalerie ouvrière issue du peuple, et je les charge d’en répandre l’action chez les travailleurs d’une France renaissante. » Non seulement Bernard ne fut pas inquiété à la Libération, pas davantage que l’abbé Rambaud, mais il purent continuer tranquillement leur action opérative et spéculative. L’association, modélisée 1901, existe encore et son slogan est : « Soyez de ceux qui construisent l'avenir ! ». Maréchal, nous sommes toujours là…

 

Dans les notes de lecture, Pierre Lachkareff nous fait l’amitié de parler des plus récents numéros de Critica Masonica, mais aussi d’un ouvrage de Pierre Laurant,  Guénon au combat, des réseaux en mal d’institution (L’Harmattan, 2019). Pierre Lachkareff conclut sa rubrique avec la naissance d’une sorte de post guénonisme. Il recense  auparavant les deux tomes de  La correspondance maçonnique échangée par Jean-Baptiste Willermoz et Claude François Achard, éditée par Jacques Rondat, aux éditions de La Tarente.

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