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Blog d'étude critique et académique du fait maçonnique, complémentaire de la revue du même nom. Envisage la Franc-Maçonnerie comme un univers culturel dont l’étude nécessite d’employer les outils des sciences humaines, de procéder à une nette séparation du réel et du légendaire et de procéder à la prise en compte de ce légendaire comme un fait social et historique.

Une Marianne noire... et maçonnique

Julien Vercel

En 8 épisodes, Alain Lewkowicz procède à une enquête documentaire « sur les traces de la Marianne noire » (réalisation : Gaël Gillon, France Culture, 3 et 4 août 2022). Le buste de 1,2 mètres de haut est installé dans le musée départemental de la Résistance et de la Déportation à Toulouse et son histoire a été l’objet d’un ouvrage, La Marianne du musée (éditions Loubatières, 2020) écrit par 4 professeurs, Daniel Chastagnac, Monique Biasi, Jacqueline Fonvieille-Ferrasse et Georges Bringuier.

L’enquête établit que ce buste provient d’une commande des francs-maçons toulousains. L’auteur serait Bernard Griffoul-Dorval, titulaire de la chaire de sculpture et directeur de l’école des Beaux-arts, partisan de Charles Fourier et franc-maçon. En effet, le 6 mars 1848, les frères de Toulouse décident d’installer le symbole de la République à l’entrée du temple en remplacement du buste de Louis-Philippe. Cinq loges se cotisent pour rassembler les 25 francs symboliques demandés par le sculpteur. Il semble qu’une ceinture due à Jean Sül Abadie ait ensuite été ajoutée en 1886.

Selon les auteurs de La Marianne au musée, cette Marianne noire symboliserait à la fois l’esclavage et la liberté, la sagesse (le sceau de Salomon est sur son sautoir) et la puissance (elle a un lion sur l’épaule comme Hercule). Comme son visage ne relève pas d’une réalisation stéréotypée, il est même envisagé qu’une modèle noire vivante ait réellement posée pour sa réalisation, d’autant plus qu’une Africaine avait été adoptée par la famille d’un des frères francs-maçons toulousains. De plus, au XIXe siècle, un rituel écossais faisait sortir une Vérité d’un puits faits de pierres en carton, or cette Vérité aurait été noire et nue... de là à penser que l’Africaine adoptée participait à la mise en scène...

Il a fallu cacher le buste dès 1864 sous le Second empire, mais c’est pendant l’Occupation qu’il a subi les plus grandes dégradations. En 1944, les collaborateurs d’un groupe de la milice surnommé « la horde sauvage » ou « la horde sanglante » saccagent les locaux maçonniques. Les miliciens s’acharnent contre le buste, une balle est même tirée puisque la Marianne noire a encore un trou au niveau de la poitrine. Mais les frères résistants réussissent à la récupérer et l’enterrent jusqu’à la Libération. Aujourd’hui, il existe 8 copies de ce buste dont l’une a été installée, le 25 juin 2021, au musée de la Franc-maçonnerie rue Cadet à Paris.

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