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CRITICA ▲

Blog d'étude critique et académique du fait maçonnique, complémentaire de la revue du même nom. Envisage la Franc-Maçonnerie comme un univers culturel dont l’étude nécessite d’employer les outils des sciences humaines, de procéder à une nette séparation du réel et du légendaire et de procéder à la prise en compte de ce légendaire comme un fait social et historique.

Cabale chrétienne : le retour

Jean-Pierre Bacot

Il fut un temps où la Cabale chrétienne était de mode, s’entend l’analyse ésotérique, non pas de « l’ancien » testament, mais du «nouveau ». En l’occurrence, Carlo Suarès (1992-1976), Juif séfarade né à Alexandrie, fut à la fois un peintre et un commentateur des deux univers. Le livre qu’il écrivit entre 1935 et 1950 s’appelle Le mythe Judéo-Chrétien d’après la genèse et les  évangiles de Matthieu et Jean. Dans cette nouvelle édition (éditions de La Tarente, 2024), il est présenté par Philippe Subrini. Si Suarès eut et conserve peut-être quelque retentissement, ce fut dans la seule sphère des chrétiens ésotéristes, probablement maçonnisés pour la plupart. Architecte de formation, fin connaisseur du théosophe Krisnamurti, Suarès ne s’interroge pas sur la crédibilité de ces narrations tardives d’une légende littéraire. Il cherche un sens caché, sans doute inspiré par Jung, mais aussi une dimension messianique dans l’incarnation de ce qu’il pose comme un mythe. Cela laisse au lecteur tout un espace de post- ou de méta-croyance pour la prise en compte d’un regard neuf sur une vieille histoire.

Dans ce champ, il fut jadis et naguère plus fréquent de rechercher de l’ésotérisme chez Jean, et en particulier dans son Apocalypse, que chez Mathieu et, a fortiori chez les deux autres, Marc et Luc, ou chez ceux que l’on appelle les apocryphes. Cela ne convaincra pas les cabalistes purs et durs qui, depuis deux bons millénaires, ratiocinent des proximités qu’ils croient signifiantes. Mais peut-être certains et certaines trouvent-il dans ces commentaires érudits à la fois une dimension poétique et l’impression de faire partie d’une élite de compréhension.

Un petit exemple croquignolet, si on nous le permet (p.158) : « La virginité de Marie est la preuve, la démonstration, que le processus dialectique s’est effectivement accompli : la passivité (chair) est transfigurée au point d’engendrer l’essence du mouvement. La force centrifuge (mâle) n’est-elle pas assassinée dans les Sociétés fonctionnelles, d’où la liberté et l’ « individuation » sont abolies?

La collection des éditions de la Tarente sises à Aubagne, chez qui est publié cet ouvrage s’appelle Anastatique, autre manière de dire fac simile ou reprint. Elles s’étaient déjà taillé un beau succès dans les milieux spécialisés en 2023 avec la publication de la Bible restituée, ouvrage du même tabac écrit par Suarès en 1977, rendant hommage à Jean-Marc Tapié de Céleyran et Marc Thivolet qui se sont attachés à sauvegarde l’œuvre et la mémoire de Carlo Suarès. Ce dernier n’est pas tendre pour les traducteurs francophones des écrits sur lesquels il travaille, sans doute en hébreu, en syriaque ou en grec.

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