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Blog d'étude critique et académique du fait maçonnique, complémentaire de la revue du même nom. Envisage la Franc-Maçonnerie comme un univers culturel dont l’étude nécessite d’employer les outils des sciences humaines, de procéder à une nette séparation du réel et du légendaire et de procéder à la prise en compte de ce légendaire comme un fait social et historique.

Ces idées venues d’ailleurs : du gender anglo-saxon à la « théorie du genre » française (3b/c)

Ces idées venues d’ailleurs : du gender anglo-saxon à la « théorie du genre » française (3b/c)

La Peur de l’égalité

Julien Vercel

Alors qu’aux États-Unis, l’expression « Gender Theory » est utilisée y compris par les fondateurs des études universitaires sur le genre, la « théorie du genre » sert, en France, à disqualifier le concept et les études sur le genre. La guerre du vocabulaire est particulièrement importante. Car l’usage du mot « théorie » se veut dévalorisant et antiscientifique, ce qui explique que la « théorie » soit également un mot repris par les activistes français contre le genre, qui refusent de considérer que l’identité puisse être triple : biologique, psychique et sociale.

Le succès de la « théorie du genre » rappelle les peurs activées au XIXe siècle lors des débats sur le travail des femmes, accusées de négliger leur devoir de procréation et de déviriliser la société dans son ensemble. Il s’inscrit aussi dans la longue histoire de la misogynie justifiant la hiérarchie des sexes par leur différence biologique. C’est ainsi qu’en 1825, dans Conseils maternels ou Manuel pour les jeunes filles, les épouses, les mères et les maîtresses de maison, Johann Ludwig Ewald écrivait : « Considérez votre corps. Sa structure en général est bien plus délicate que n’est celle de l’homme ; signe évident que vous devez vivre à l’abri du toit domestique ».

De son côté, le mouvement ouvrier avait craint la concurrence des femmes dans le travail et adopté les préjugés de l’époque. Il était notamment sous l’influence de Pierre-Joseph Proudhon qui considérait la femme comme un être inférieur à l’homme (« Là où la virilité manque, le sujet est incomplet », De la justice dans la Révolution et dans l’Église, 1858). Le seul destin de la femme était d’être au service de son époux, de son ménage et de la procréation. Le congrès de Paris de la Ière Internationale était ainsi encore dans cette optique en 1867 lorsqu’il déclarait que « La femme a pour but essentiel d’être mère de famille, la femme doit rester au foyer, le travail doit lui être interdit ».

Les réactionnaires contre le travail des femmes iront plus loin en développant une vision carrément apocalyptique où les femmes cesseraient de procréer et détruiraient ainsi les bases de la société livrée alors aux « invertis », « sodomites » et « masturbateurs ». Les études de genre ont réactivé cette terreur de l’abolition de toutes les différences et particulièrement de celle entre les hommes et les femmes. C’est là qu’est venu le temps de la contagion politique.

À suivre

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