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Blog d'étude critique et académique du fait maçonnique, complémentaire de la revue du même nom. Envisage la Franc-Maçonnerie comme un univers culturel dont l’étude nécessite d’employer les outils des sciences humaines, de procéder à une nette séparation du réel et du légendaire et de procéder à la prise en compte de ce légendaire comme un fait social et historique.

« L’histoire religieuse contemporaine en France » de Dominique Avon

Jean-Pierre Bacot

 

Cet ouvrage imposant qui vient de paraître aux éditions de la Découverte (295 pages, 25 euros) est à la fois un maître-livre qui étudie en profondeur les modifications intervenues au XXème siècle et au début du XXIème siècle en matière d’histoire religieuse et, minoritairement de sociologie, et le constat, non dit, d’un changement de paradigme qui voit son objet s’éteindre.

Cependant, un fait est noté par Dominique Avon, en fin d’ouvrage : après étude des sujets de nombreuses thèses en cours, l’agnosticisme et l’athéisme n’intéressent personne. Cela veut donc dire que ces catégories n’appartiennent pas, fût ce en miroir, au corpus religieux. Les anticléricaux, s’il en reste, diraient : on ne soigne que les malades.

L’auteur montre comment l’on est progressivement passé en France d’un cadre de recherche où œuvraient des religieux de l’histoire ou de la sociologie, à un autre où l’université prenait en compte le fait religieux comme d’autres aspects de la société. Pour autant, les chercheurs spécialisés venaient et viennent encore le plus souvent eux-mêmes d’une tradition religieuse et, par ailleurs, tout le monde n’est pas convaincu que l’histoire religieuse soit, en soi, une discipline. Dominique Avon montre en fait, en détails, l’évolution d’une corporation qui aura cherché à s’autonomiser.

Ce livre consiste donc, on l’aura compris, en un impressionnant travail de recherche sur une discipline - l’histoire et la sociologie du fait religieux, voire l’anthropologie, la philosophie, la théologie et le droit - et ses personnels, mais à propos d’un monde qui disparaît. Entendons-nous bien, et nous avons souvent abordé le sujet sur ce blog, la religion, même en France, ne se meurt pas, mais elle ne concerne plus guère que des minorités, majoritairement inscrites dans des couches discriminées et/ou marginales de la société, qu’il s’agisse de l’Islam ou des protestantismes évangéliques chez les Gitans ou dans les Outre-Mer, voire des traces de judaïsme séfarade post pied-noir et de catholicisme traditionaliste. Étudier ces phénomènes, parallèlement à la montée d’un athéisme aujourd’hui majoritaire, réclame la naissance de nouvelles disciplines : l’histoire et la sociologie du post-religieux.

L’auteur note à plusieurs reprises que la culture religieuse disparaît de la connaissance historique et sociologique que peuvent avoir les étudiants. Le christianisme a quitté le monde des préoccupations à mesure que son clergé s’étiolait et que les pratiques déclinaient. On peut donc s’attendre à de profondes modifications du domaine qui nous est décrit. La théologie a largement baissé d’intensité, l’histoire et la sociologie des religions prennent le même chemin, mais un livre aura témoigné de leur splendeur aujourd’hui passée.

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