Blog d'étude critique et académique du fait maçonnique, complémentaire de la revue du même nom. Envisage la Franc-Maçonnerie comme un univers culturel dont l’étude nécessite d’employer les outils des sciences humaines, de procéder à une nette séparation du réel et du légendaire et de procéder à la prise en compte de ce légendaire comme un fait social et historique.
Julien Vercel
Nicolas Sarkozy montre du doigt ces pauvres qui n’ont pas encore fait leur transition démographique
Le 14 septembre 2016, Nicolas Sarkozy commence sa démonstration devant des patrons à l’Institut de l’entreprise, par une leçon de modestie : « cela fait 4 milliards d’années que le climat change » et il faut « être arrogant comme l’homme pour penser que c’est nous qui avons changé le climat ». Mais, très vite, il en est certain : « la première cause de dégradation de l’environnement, c’est le nombre d’habitants sur la planète » ! « Salauds de pauvres » (disait Grandgil interprété par Jean Gabin dans La Traversée de Paris de Claude Autant-Lara, 1956) qui n’ont pas encore fait leur transition démographique !
Nicolas Sarkozy a –encore une fois- changé. Oublié le président qui organisait le Grenelle de l’environnement en 2007 et qui déclarait à la tribune des Nations unies, le 22 septembre 2009, à propos du changement climatique : « Nous savons que nous devons le limiter à deux degrés et que si nous ne réussissons pas, ce sera la catastrophe. Ce point ne supporte plus aucun débat » et qui proposait que, « pour les pays développés, ce n'est pas une réduction de 50% qu'il faut, c'est une réduction d'au moins 80% d'ici 2050 ». Adieu la responsabilité des pays industrialisés, il faut que les pays pauvres mettent des capotes !
Pourtant la réalité est bien éloignée de ces propos de comptoir. Comme le rappelle Pierre André (« Sarkozy, Trump : le populisme climatosceptique comme stratégie de campagne ? », La Tribune, 16 septembre 2016), les régions d’Asie du Sud et d’Afrique, là où la croissance démographique est la plus forte, n’émettent en moyenne que 2,4 tonnes de gaz carbonique (CO2) par habitant contre 20 tonnes pour les Américains et 9 tonnes pour les Européens de l’Ouest. Car ce n’est pas le poids démographique qui importe, c’est la consommation !
Mais Nicolas Sarkozy, comme Donald Trump, préfère nier les vérités scientifiques pour séduire son auditoire… Ils rejoignent George Bush qui, au sommet de Rio en 1992, affirmait que le mode de vie américaine n’était « pas négociable ». Avec l’« argument » démographique, Nicolas Sarkozy refile la responsabilité du changement climatique et son coût aux pays les plus pauvres, à ces incorrigibles pays qui laissent leur population proliférer et sont incapables de mettre en œuvre une politique malthusienne. Mais la ficelle était sans doute trop grosse et n’a pas trompé les électeurs de la primaire de la droite. Peut-être alors que René Girard avait raison : « Les persécuteurs ne peuvent pas imposer durablement leur façon de voir aux hommes qui les entourent » (Le Bouc émissaire, Grasset, 1982).